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Black Lives Matter Project

À travers les lumineux portraits pochés par Jalb38, l’objectif est de mettre en évidence certains acteurs et actrices afro-américains qui ont contribué au mouvement des droits civiques des Noirs aux États-Unis. Nous vous proposons de suivre à travers 8 personnalités, l’évolution de certaines actions et événements historiques marquants dans le mouvement des droits civiques afro-américain et la façon dont aujourd’hui, la lutte est toujours d’actualité. 

Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)
Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)

Harriet Tubman naquit vers l’année 1820 à Auburn, dans l’Etat d’Alabama, dans le Sud esclavagiste des États-Unis. Elle vécut avec sa mère et ses frères et sœurs dans une plantation. Son père vécut seul dans une autre plantation. Ce dernier fut affranchi contrairement à la mère d’Harriet Tubman. Harriet travailla dès ses 6 ans dans les champs. Elle connut de mauvais traitements physiques. En 1849, elle réussit à s’enfuir de sa plantation et parvint à Philadelphie. Elle fut aidée par l’Underground Railroad : un réseau de fuite qui empruntait le nom d’un chemin de fer et était surtout un moyen de faire fuir les esclaves du Sud vers le Nord. En effet, à cette période, de nombreux esclaves noirs étaient affranchis dans le Nord. Elle rejoignit le mouvement abolitionniste de la ville et dirigea par la suite une insurrection armée de libération des esclaves. Elle mourra le 10 mars 1913 à environ 93 ans, dans la maison pour nécessiteux noirs qu’elle avait fondée à Auburn en Alabama.

 

Quelques actions marquantes d’Harriet Tubman :

 

-     En 1850, elle intégra l’Underground Railroad.

-    Entre 1851 et 1861, elle prit en charge à elle seule dix-huit expéditions vers le Sud et aida près de trois-cents esclaves à fuir vers le Nord. Elle ne fut jamais prise et ne perdit aucun esclave.

 

Pour aller plus loin :

-       Série Underground : inspirée de l’histoire d’Harriet Tubman

-       Harriet, Film

-       Podcast France Culture : « La Moïse Noire de l’Amérique (2 épisodes) »


Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)
Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)

Rosa Parks fut une figure marquante de protestation contre les lois Jim Crow dans les États du Sud des États-Unis. Ces lois ségrégationnistes furent promulguées entre les années 1877 et 1964. Elles instaurèrent la séparation entre les Noirs et les Blancs dans les transports, les lieux publics, le logement, l’emploi ou encore les établissements scolaires. Rosa Parks naquit le 4 février 1913 en Alabama, dans le Sud des États-Unis, et ce en pleine ségrégation. Elle grandit avec ses grands-parents et se souvenait d’ailleurs lorsque son grand-père assurait la sécurité du domicile de potentielles attaques du Ku Klux Klan. Après avoir terminé le lycée, elle fut contrainte d’arrêter ses études pour s’occuper de sa grand-mère malade. À dix-neuf ans, elle épousa Raymond Parks et s’engagea avec lui auprès de l’Association nationale pour la promotion des gens de couleur. En 1955, Rosa Parks fit le choix de rester assise dans un bus, celui de ne pas céder sa place à une personne blanche. Ce geste aura un impact significatif dans le mouvement des droits civiques. Par la suite, elle ne cessa de s’engager en ce sens. Elle décédera le 24 octobre 2005 à Détroit.

 

Quelques actions marquantes de la défenseuse des droits civiques :

 

- En 1943, elle fut violemment expulsée par un chauffeur après avoir décidé de monter dans un bus par l’avant plutôt que par l’arrière car il y avait du monde. Frustrée par cette situation, elle arrêta de prendre le bus durant un moment.

 

- En 1955, elle s’installa dans un bus conduit par le même chauffeur qui l’expulsa. Elle refusa de céder sa place à un Blanc comme le demandait le chauffeur de bus. Elle fut arrêtée et emprisonnée pour cela. Elle reçut une amende de 10 dollars. Ce geste eut une influence significative, car son histoire fut reprise par le Dr Martin Luther King junior et mena à un boycott de plus d’un an des bus à Montgomery. Cette action aboutit à l’interdiction de la ségrégation dans les bus.

 

- Depuis, Rosa Parks s’engagea dans de nombreuses actions pour le mouvement des droits civiques afro-américain. En 1987, elle cofonde avec son amie, Elaine Eason Steele, l'Institut Rosa et Raymond Parks pour le développement personnel.

 

Pour aller plus loin :

https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-deux-parties/rosa-parks-12-rosa-parks-pas-celle-que-vous-imaginez


Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)
Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)

Billy Holiday naquit en 1915 sous le nom d’Eleonora Faiken. Elle grandit dans un quartier de Baltimore dans le Nord-Est des États-Unis. Elle connut une enfance tourmentée. Sa mère n’était qu’une adolescente à sa naissance et essayait comme elle le pouvait de subvenir à ses besoins en tant qu’employée de maison pour des Blancs. Elle se prostituait également. Billy Holiday grandit dans l’univers des maisons closes et y découvrit le jazz. Elle passa beaucoup de temps aux côtés des musiciens ce qui lui permit de connaître ce métier et de s’adapter à cet univers très masculin. Elle connut plusieurs drames personnels. Elle fut victime d’un viol à onze ans et séjourna en prison à quatorze ans pour prostitution. En 1930, à sa sortie de prison, elle décida de tenter sa chance dans la musique. Elle se produisit dans des clubs à Harlem et réussit à en vivre. Elle fut reconnue dans le domaine par son timbre, sa musique et sa culture musicale. L’aspect amer de sa réussite est qu’elle se construisit dans un contexte de ségrégation. À sa façon, Billy Holiday s’est opposée à ce système par diverses actions. Elle est décédée le 17 juillet 1959 à New York.

 

Quelques actions marquantes de celle qui fut surnommée Lady.D :

 

- En 1938, elle réalisa une tournée avec un orchestre de musiciens blancs. Elle se produisit  uniquement pour un public blanc. Dans les États du Sud, on ne souhaitait pas voir de  chanteuses noires. C’est donc une chanteuse blanche qui se produisait sur scène à sa place. Dans les autres États, elle n’avait pas le droit de manger au restaurant et on lui apportait un  plateau. Un jour, à New York, le groupe devait se produire et on demanda à Billy Holiday de prendre le monte-charge pour se rendre sur scène. Elle décida de quitter la tournée en déclarant qu’elle ne chanterait plus jamais avec un groupe blanc.

 

- En 1939, le Café Society de New York, un nouveau club mixte demanda à Billy Holiday de chanter Strange fruit, une chanson écrite par Lewis Allen, un homme blanc. Cette chanson fut inspirée d’une photo de deux jeunes hommes noirs se faisant lyncher dans l’Indiana. Lorsqu’on lui présenta cette chanson, l’artiste ne fut pas convaincue. Cette chanson se distinguait clairement de son répertoire habituel. Finalement, la dénonciation de l’injustice et du racisme dans cette chanson la poussèrent à accepter.

 

Billy donna sa vie à cette chanson qui dénonce le lynchage. La chanteuse devint plus connue et sollicitée. À New York, elle se produisit tous les soirs dans un club. Cependant, certains clubs ne souhaitaient pas passer cette chanson. Billy Holiday était parfois obligée de l’imposer dans ses contrats. Le FBI lui fit comprendre que si elle arrêtait d’interpréter cette chanson, elle serait tranquille. La chanteuse refusa. Elle fut suivie, surveillée et traquée. Ses déboires liés à son addiction à certaines drogues ont été utilisés pour l’arrêter à plusieurs reprises. En mai 1947, elle fut condamnée à un an de prison. À sa sortie, n’ayant plus sa carte de cabaret, elle ne se produisait que dans des lieux restreints. Elle eut quelques succès en Europe et fut toujours surveillée par le FBI jusqu’à son décès le 17 juillet 1959 à New-York.

 

Pour aller plus loin :

-       Documentaire : Un supplément d’âme, Arte.

-       http://www.jazzradio.fr/news/culture-et-societe/31448/decouvrez-l-histoire-derriere-strange-fruit-de-billie-holiday


Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)
Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)

Ce pianiste, chanteur, compositeur afro-américain a façonné le son du rythme et blues. Il naquit en 1930 en Géorgie dans une famille pauvre. À 4 ans, il fut atteint d’un glaucome qui le mènera à la cécité totale trois ans plus tard. À 5 ans, il assista à la mort de son petit-frère par noyade. Un évènement traumatisant pour lui. Il commença des cours de piano à l’âge de 5 ans, mais c’est à l’école qu’il développa sa pratique. À 15 ans, après la mort de sa mère, il quitta l’école pour gagner sa vie dans la musique. C’est dans les années 1950 qu’il connut un succès fulgurant aux États-Unis. Ray Charles est décédé d’une maladie du foie le 10 juin 2004 à Beverly Hills.

 

 

 

Quelques actions marquantes de Ray Charles :

 

- Il apporta un soutien financier au révérend Martin Luther King Jr. et le mouvement des droits civiques.

 

- Au début des années 1950, lorsqu’il rencontra un franc succès, il décida de retourner en Géorgie pour un seul et unique concert. À son arrivée, il constata que la salle dans laquelle il se produisait n’était réservée qu’aux blancs. Il annula sa représentation et s’en alla. Il aurait été dit que l’artiste aurait été interdit de concert durant plusieurs années en Géorgie après cet évènement.

 

Pour aller plus loin :

-       https://www.vanityfair.fr/culture/voir-lire/articles/le-jour-ou-ray-charles-a-refuse-de-chanter/46413

http://www.myblackhistory.net/Ray%20Charles.htm


Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)
Portrait poché par @jalb38 ( Instagram)

Leader marquant des mouvements des droits civiques afro-américains, Martin Luther King naquit en 1929 en Alabama. Après avoir sauté deux classes, il termina le lycée à quatorze ans. Il poursuivit ses études dans le domaine de la théologie à la faculté Crozier et obtint son doctorat. À dix-huit ans, il savait déjà qu’il souhaitait suivre les traces de son père et de son grand-père qui étaient prêcheurs à l’église. Dr Martin Luther King devint pasteur. Tout au long de sa vie, il utilisa ses talents d’orateurs dans sa lutte non violente pour le droit des afro-américains dans une période ségrégationniste. Ses discours, ses actions et convictions lui ont valu de nombreuses arrestations et menaces de mort. Il fut assassiné le 4 avril 1968 à Memphis par un tireur d’élite.

 

Quelques actions marquantes du Leader :

 

- En 1955, il appela au boycott des bus à Montgomery à la suite de l’arrestation de Rosa Parks, femme afro-américaine et militante qui fut arrêtée pour avoir refusé de laisser sa place à un homme blanc. Le boycott dura 381 jours. Les pertes financières engrangées furent tellement élevées que le 13 novembre 1956, 1 an après l’arrestation de Rosa Parks, la Cour suprême décréta la ségrégation dans les bus illégale.

 

- En 1957, aux côtés d’autres leaders du Sud des États-Unis, il participa à la création de la Southern Christian Leadership Conference (SCLC). L’objectif de cette organisation était de coordonner les actions de lutte pour les droits civiques dans le Sud. Dr Martin Luther King en était le Président. En 1961, la ségrégation dans les transports inter-états fut abolie.

 

- En 1963, il prononça son discours légendaire « I have a dream » lors de la marche sur Washington réunissant plus de 200 000 personnes. De nombreux leaders et citoyens y ont participé. En 1964, un projet de loi sur les droits civiques fut voté. Il accorda le droit de vote aux hommes noirs et interdisait la ségrégation dans les écoles et dans l’emploi.

 

Pour aller plus loin :

-     Documentaire Dr Martin Luther King Junior : I have a dream, réalisé par Culture Tube


George Floyd est un homme noir de 46 ans, mort le lundi 25 mai 2020 à Minneapolis des mains d’un policier blanc. Sa mort a provoqué des émeutes dans la ville. Elles se sont propagées à New York, Philadelphie, Dallas, Las Vegas, Seattle, Des Moines, Memphis, Los Angeles, Atlanta, Miami, Portland, Chicago, ou encore la capitale, Washington. La mort de George Floyd et les émeutes qui ont suivi représentent la colère face aux violences policières qui ont touché et touchent encore de nombreux Afro-Américains.

 

Selon une étude réalisée en 2019 par Fatal Encounters, un Consortium de journalistes et les chiffres du National Vital Statistics, les Afro-Américains constitueraient la population la plus à risque estimant que 1 sur 1000 mourra de violences policières. Ces derniers ont 2,5 fois plus de chances que les blancs d’êtres tués par la police.

 

En 2015, le Washington Post a recensé les personnes tuées par la police. Plus de 5000 décès ont été comptabilisés. Les Afro-Américains représentent 13 % de la population américaine et pourtant depuis 2015, la police a tué environ 1262 noirs soit un taux de 30 pour un million. Si le nombre de Blancs tués par la police est plus élevé avec 2 412 personnes tuées, le taux est en revanche bien plus faible à 12 pour un million.

 

Sources, pour aller plus loin :

 https://www.lexpress.fr/actualite/monde/huit-chiffres-accablants-qui-montrent-l-ampleur-du-racisme-aux-etats-unis_2127271.html

-       https://www.lexpress.fr/actualite/monde/george-floyd_2127173.html


Barack Obama est né en 1961 à Hawaï. Il vécut en Indonésie jusqu’à l’âge de 10 ans avant de revenir à Hawaï. En 1979, il s’installa à Los Angeles pour étudier à l’Occidental College, une université d’arts libéraux. Deux ans plus tard, il suivit un cursus de sciences politiques et de relations internationales à l’Université de Columbia. En 1988, il intégra Harvard et devint le premier Président Noir de la « Harvard Review Law ». En 1996, il fut élu sénateur de l’Illinois puis réélu en 1998 et en 2002. Il fut réélu une nouvelle fois en 2004 ce qui lui servit de tremplin dans la course aux élections vers la Présidence. En 2008, il est devenu le 44e Président des États-Unis. Il est le premier homme noir américain à avoir accédé à la maison blanche.

 

Quelques actions marquantes de Barack Obama :

 

-  Marquer l’Histoire et redonner l’espoir : « Si jamais quelqu’un doute encore que l’Amérique est un endroit où tout est possible, qui se demande si le rêve de nos pères fondateurs est toujours vivant, qui doute encore du pouvoir de notre démocratie, la réponse lui est donnée ce soir », avait affirmé le Président élu lors de son discours de victoire.

 

-   Sortir de la crise financière en approuvant un plan de sauvetage des entreprises américaines en difficulté.

 

-   Voter la loi sur les soins abordables surnommée « Obamacare » permettant au plus grand nombre d’Américains de bénéficier d’une couverture Santé. 

 

Pour aller plus loin :

https://www.parismatch.com/People-A-Z/Barack-Obama

Film Barry, Netflix 


Enfant d’immigrés jamaïcain et indien, elle naquit en 1964 et grandit à Oakland dans la baie de San Francisco. Dans les années 1960, ses parents l’emmenèrent avec eux dans les manifestations de lutte et de mouvement pour les droits civiques. Le 21 janvier 2021, elle a occupé officiellement sa fonction de vice-présidente des États-Unis. Elle est la première femme vice-présidente.

 

Quelques actions de Kamala Harris :

 

- Après deux mandats de procureure à San Francisco (2004-2011), elle a été élue deux fois procureure de Californie (2011-2017), devenant alors la première femme, mais aussi la première personne noire, à diriger les services judiciaires de l’État le plus peuplé du pays.

 

- En janvier 2017, elle a prêté serment au Sénat à Washington, s’inscrivant ici comme la première femme originaire d’Asie du Sud et la seconde sénatrice noire dans l’histoire américaine. Elle est devenue connue pour son style de procureur d’interroger les témoins lors des audiences, ce qui a suscité des critiques, et des interruptions occasionnelles de la part des sénateurs républicains.

 

- En 2020, elle devint l’une des principaux défenseurs de la réforme de la justice sociale après le décès de George Floyd, un des nombreux Afro-Américains morts à la suite d’une violence policière. Elle fut élue vice-présidente des États-Unis en novembre 2020 avant de prendre ses fonctions le 21 janvier 2021


Le mouvement des droits civiques afro-américains : ponctué d’avancées historiques marquantes et qui nécessite une lutte constante

 

La mise en esclavage d’Africains aux États-Unis a duré près de 250 ans. Durant cette période, parmi les esclaves, de nombreuses personnes ont fait preuve de résistance. Parmi elles, Harriet Tubman est une figure féminine majeure de résistance dans ce système esclavagiste. Née entre 1820 et 1825 en Alabama, un État du Sud des États-Unis, elle vécut avec sa mère et ses frères et sœurs dans une plantation. Son père qui vivait dans une autre plantation a été affranchi, mais pas sa mère. Harriet a travaillé dès ses 6 ans dans les champs. En 1849, à l’âge de 29 ans, elle réussit à s’enfuir de sa plantation et parvint à Philadelphie. Elle fut aidée par l’Underground Railroad, un réseau qui permit la fuite d’esclaves du Sud vers le Nord. A cette période, de nombreux esclaves étaient affranchis dans le Nord. Entre 1851 et 1861, Harriet Tubman prendra en charge à elle seule dix-huit expéditions vers le Sud et aidera près de trois-cents esclaves à fuir vers le Nord. Entre 1861 et 1865, une guerre civile survint entre les États du Nord dirigés par Abraham Lincoln et les États confédérés du Sud. Les premiers étaient pour l’abolition de l’esclavage, les seconds non. Harriet Tubman s’est engagée dans l’armée aux côtés des États du Nord. L’issue de cette guerre a donné raison à Abraham Lincoln et les États du Nord. En 1865, l’esclavage fut aboli.

 

 

Les États du Sud n’ont pas dit leur dernier mot. Profitant du régime fédéral qui confère à chaque État américain une très grande liberté dans la façon de régir le statut de ses habitants, à partir de 1876 les onze ex-États sécessionnistes purent contourner la loi. Entre les années 1877 et 1964, ces lois ont instauré la séparation entre les Noirs et les Blancs dans les transports, les lieux publics, le logement, l’emploi ou encore les établissements scolaires. Ces lois intervenaient également au niveau des droits civiques en créant des obstacles pour décourager les personnes noires de voter et d’accéder à des postes de décision (taxes aux bureaux de votes, tests d’alphabétisation ou d’hérédité). Durant près de 100 ans, les Afro-Américains étaient considérés comme des citoyens de seconde zone dans ces États. Néanmoins, de nombreuses personnalités noires ont lutté avec courage, détermination et parfois au péril de leur vie, pour dénoncer et abroger ces lois portant atteinte aux droits civiques. 

Production finale du Black Lives-Matter Project avec les portraits des quatre femmes présentées plus haut. Portraits représentés par le pochoiriste : @jalb38 (sur instagram)
Production finale du Black Lives-Matter Project avec les portraits des quatre femmes présentées plus haut. Portraits représentés par le pochoiriste : @jalb38 (sur instagram)

C’est le cas de la chanteuse Billy Holiday. Cette dernière est née en 1915 en pleine période de ségrégation à Baltimore. Elle connut une enfance tourmentée. Sa mère n’était qu’une adolescente à sa naissance et essayait comme elle le pouvait de subvenir à ses besoins en tant qu’employée de maison pour des Blancs et en se prostituant. Billy Holiday grandit dans l’univers des maisons closes et y découvrit le jazz. Elle passa beaucoup de temps aux côtés des musiciens ce qui lui permit de connaître ce métier et de s’adapter à cet univers très masculin. Après plusieurs drames, c’est en 1930, à sa sortie de prison qu’elle décida de tenter sa chance dans la musique. Elle se produisit dans des clubs à Harlem et réussit à gagner sa vie. Elle fut reconnue dans le domaine par son timbre, sa musique et sa culture musicale.

 

Strange Fruit. C’est cette chanson qui permit à Billy Holiday de développer davantage sa popularité tout en devenant une cible à persécuter par les gouvernements des États du Sud esclavagistes. En 1939, le Café Society de New York, un nouveau club mixte demanda à Billy Holiday de chanter Strange fruit, une chanson écrite par Lewis Allen, un homme blanc. Cette chanson lui fut inspirée d’une photo de deux jeunes hommes noirs se faisant lyncher dans l’Indiana. Billy donna vie à cette chanson. La chanteuse devint plus connue et sollicitée. Cependant, certains clubs ne souhaitèrent pas passer cette chanson. Billy Holiday fut parfois obligée de l’imposer dans ses contrats avec certains clubs. Le FBI lui fit comprendre que si elle arrêtait d’interpréter cette chanson, il la laisserait tranquille. La chanteuse refusa. Elle fut suivie, surveillée et traquée. Ses déboires liés à son addiction à certaines drogues furent utilisés pour l’arrêter à plusieurs reprises. En mai 1947, elle fut condamnée à un an de prison. À sa sortie, n’ayant plus sa carte de cabaret, elle ne se produisait que dans des lieux restreints. Elle eut quelques succès en Europe et fut toujours surveillée par le FBI jusqu’à son décès le 17 juillet 1959 à New York.

 

Seize ans après que Billy Holiday chanta Strange Fruit pour la première fois dans ce club, une autre femme marquera un tournant dans l’évolution du mouvement des droits civiques afro-américains. Il s’agit de Rosa Parks. Née le 4 février 1913 en Alabama, dans le Sud des États-Unis, et ce en pleine ségrégation, elle grandit avec ses grands-parents et se souvenait d’ailleurs lorsque son grand-père assurait la sécurité du domicile de potentielles attaques du Ku Klux Klan. Après avoir terminé le lycée, elle fut contrainte d’arrêter ses études pour s’occuper de sa grand-mère malade. À dix-neuf ans, elle épousa Raymond Parks et s’engagea avec lui auprès de l’Association nationale pour la promotion des gens de couleur. En 1955, alors qu’elle était installée dans un bus et que des personnes blanches entraient, le chauffeur lui demanda de céder sa place. Elle refusa et fut arrêtée et emprisonnée pour cela. Elle reçut une amende de 10 dollars. Ce geste illustrait le refus et l’exaspération face à ce système de domination ancré et régit par la loi depuis de nombreuses années. L’histoire de Rosa Parks lanca celle du Dr Martin Luther King junior en tant que leader des mouvements des droits civiques afro-américains.

 

Production finale du Black Lives-Matter Project avec les portraits des quatre hommes présentés plus haut.  Portraits réalisés par le pochoiriste @jalb38 ( instagram)
Production finale du Black Lives-Matter Project avec les portraits des quatre hommes présentés plus haut. Portraits réalisés par le pochoiriste @jalb38 ( instagram)

Dr Martin Luther King junior est né en 1929 en Alabama. Après avoir sauté deux classes, il termina le lycée à quatorze ans. Il poursuivit ses études dans le domaine de la théologie à la faculté Crozier et obtint son doctorat. À dix-huit ans, il sut déjà qu’il souhaitait suivre les traces de son père et de son grand-père qui étaient prêcheurs à l’église. Dr Martin Luther King devint pasteur. Tout au long de sa vie, il utilisa ses talents d’orateurs dans sa lutte non violente pour le droit des Afro-Américains. En 1955, après l’arrestation de Rosa Parks, il lança un appel au boycott des bus qui dura 381 jours à Montgomery. Les pertes engendrées furent telles que le 13 novembre 1956, l’interdiction de la ségrégation dans les bus sera proclamée par la Cour Suprême. Un an plus tard, Martin Luther King, créa la Southern Christian Leadership Conference (SCLC), dont il est le Président. Cette organisation coordonna les actions de lutte pour le mouvement des droits civiques. Ces actions menèrent à l’interdiction de la ségrégation dans les transports inter-états. En 1963, il prononça son discours légendaire « I have a dream » lors de la marche sur Washington réunissant plus de 200 000 personnes. En 1964, un projet de loi sur les droits civiques fut voté. Il accorda le droit de vote aux hommes noirs et interdit la ségrégation dans les écoles et dans l’emploi. Dr Martin Luther King a mené l’ensemble de ses actions au péril de sa vie. Il a été assassiné le 4 avril 1968 à Memphis.

 

 

À travers les parcours de Harriet Tubman, Billy Holiday, Rosa Parks et Dr Martin Luther King, nous observons de quelle façon ces militants ce sont engagés dans des actions politiques et stratégiques vers la libération de l’esclavage pour Harriet Tubman et vers la fin de la ségrégation pour Rosa Parks et Dr Martin Luther King. L’artiste Billy Holiday a démontré de quelle façon son statut d’artiste était également une tribune pour dénoncer un acte cruel, le lynchage. De nombreux artistes ont d’ailleurs comme Billy Holiday utilisé leur art comme vitrine afin d’informer, d’impulser et influencer un maximum de personnes sur la condition et la lutte pour les droits des Afro-Américains. Nous pouvons citer Ray Charles.

Ray Charles est un pianiste, chanteur, compositeur afro-américain qui a façonné le son du rythme et du blues. Il naquit en 1930 en Géorgie dans une famille pauvre. À 4 ans, il fut atteint d’un glaucome qui le mena à la cécité totale trois ans plus tard. À 5 ans, il assista à la mort de son petit-frère par noyade. Un évènement traumatisant pour lui. Il commença des cours de piano à l’âge de 5 ans, mais c’est à l’école qu’il développa sa pratique. À 15 ans, après la mort de sa mère, il quitta l’école pour gagner sa vie dans la musique. C’est dans les années 1950 qu’il connut un succès fulgurant aux États-Unis. Bien que les actions militantes de Ray Charles n’aient pas été beaucoup mises en avant par rapport à d’autres artistes, ce dernier a apporté son soutien financier au révérend Martin Luther King Jr. et le mouvement des droits civiques. Par ailleurs, toujours dans les années 1950, il retourna en Géorgie pour un seul et unique concert. À son arrivée, il constata que la salle dans laquelle il se produisait n’était réservée qu’aux blancs. Il annula sa représentation et s’en alla. Il aurait été dit que l’artiste aurait été interdit de concert durant plusieurs années en Géorgie après cet évènement. Ray Charles est décédé d’une maladie du foie le 10 juin 2004 à Beverly Hills

 

Depuis la période de l’esclavage à la ségrégation, de nombreuses personnalités ont lutté contre ce système de domination. Le courage et la détermination d’une ancienne esclave enfuie, d’activistes et artistes ont permis de marquer l’Histoire. Ce ne sont que quelques exemples de femmes et d’hommes parmi d’autres. L’abolition de l’esclavage en 1865, l’interdiction de la ségrégation dans les transports en 1956, le vote d’un projet de loi sur les droits civiques en 1964, autant d’évènements historiques marquants.

 

 

       En 2008, plus de 40 ans après le vote du projet de loi sur les droits civiques, un évènement historique majeur marqua une avancée symbolique dans l’histoire des Afro-Américains. Il s’agit de l’élection du Président Barack Obama, le 44e Président des États-Unis d’Amérique. Né en 1961 à Hawaï d’un père kenyan et d’une mère hawaïenne, il vécut en Indonésie jusqu’à l’âge de 10 ans avant de revenir à Hawaï. En 1979, il s’installa à Los Angeles pour étudier à l’Occidental College, une université d’arts libéraux. Deux ans plus tard, il suivit un cursus de sciences politiques et de relations internationales à l’Université de Columbia. En 1988, il intégra Harvard et devint le premier Président Noir de la « Harvard Review Law ». En 1996, il fut élu sénateur de l’Illinois puis réélu en 1998 et en 2002. Il fut réélu une nouvelle fois en 2004 ce qui lui servit de tremplin dans la course aux élections vers la Présidence. En 2008, il est devenu le 44e Président des États-Unis. Il est le premier homme noir américain à avoir accédé à la maison blanche.

 

Lorsque nous déroulons l’évolution de l’histoire des Afro-Américains depuis l’esclavage à l’élection de Barack Obama nous ne pouvons que saluer les avancées majeures grâce à l’action de nombreuses personnalités. Toutefois, résumer l’évolution de ces droits à ces avancées nous semble réducteur. En effet, l’élection du Président Barack Obama a permis une avancée historique et symbolique et dans le même temps, les inégalités raciales ont persisté dans le continent. Les violences policières contre les noirs en Amérique furent une problématique majeure durant son mandat. En 2015, le Washington Post a recensé les personnes tuées par la police. Plus de 5000 décès ont été comptabilisés. Les Afro-Américains représentent 13 % de la population américaine et pourtant depuis 2015, la police a tué environ 1262 Afro-Américains soit un taux de 30 pour un million. Si le nombre de Blancs tués par la police est plus élevé avec 2 412 personnes tuées, le taux est en revanche bien plus faible à 12 pour un million.

 

Le 25 mai 2020, George Floyd, un homme noir de 46 ans est mort à Minneapolis des mains d’un policier blanc. Sa mort a provoqué des émeutes dans la ville qui se sont propagées à New York, Philadelphie, Dallas, Las Vegas, Seattle, Des Moines, Memphis, Los Angeles, Atlanta, Miami, Portland, Chicago, ou encore la capitale, Washington. La mort de George Floyd et les émeutes qui ont suivi illustrent la colère face aux violences policières qui ont touché et touchent encore de nombreux hommes et femmes noires afro-américains.

 

Le 21 janvier 2021, Kamala Harris a pris sa fonction de première femme Vice-Présidente des États-Unis. Elle a défendu la réforme de la justice sociale après la mort de George Floyd. Enfant d’immigrés jamaïcain et indien, elle est née en 1964 et a grandi à Oakland dans la baie de San Francisco. Son élection est à l’image de celle de Barack Obama, un fait historique et symbolique fort.

 

 L’analyse des contextes dans lesquels s’inscrivent ces parcours nous permettent de constater l’évolution des luttes pour le mouvement des droits civiques. Cette lutte a été ponctuée de nombreuses résistances et batailles glorieuses avec l’abolition de l’esclavage, la fin de la ségrégation et le droit de vote. Des évènements symboliques comme les élections de Barack Obama et de Kamala Harris ont été porteurs d’espoir. Toutefois, il convient de préciser que ces avancées n’ont malheureusement pas permis d’agir à la source du problème. La guerre contre le système de domination n’est pas encore gagnée. L’esclavage et la ségrégation ont laissé place à l’incarcération massive en prison et les violences policières des noirs en Amérique. Le documentaire13th, réalisé par la productrice Ava Duvernay décrit très bien la façon dont la prison est devenue une alternative pour réduire les Afro-Américains en esclavage. Aux États-Unis, avec des différences selon les états, toutes les personnes condamnées, qu’elles soient en prison ou non sont privés du droit de vote. Selon un article des Echos, les Noirs ont 6 fois plus de chances d’aller en prison que les personnes blanches. Par ailleurs, de nombreuses entreprises multinationales bénéficient d’une main-d’œuvre « bon marché », pour ne pas dire gratuite, à travers la population carcérale qui travaille pour ces entreprises. Autant d’éléments qui nous amènent à considérer la lutte pour le mouvement des droits civiques américains comme une lutte de chaque instant. La création d’organisations telles que le mouvement politique Black Lives Matter en 2013 pour lutter et dénoncer le racisme systémique envers les noirs aux États-Unis démontre la nécessité de poursuivre cette lutte. De nombreuses personnalités sportives et artistiques utilisent également leur voix pour dénoncer le racisme aux États-Unis. Sans oublier les citoyens afro-américains qui luttent comme ils le peuvent au quotidien.

 

 

Des actions qui se poursuivent dans la même lignée que les actions menées par les personnalités présentées. Des personnes marquées par de fortes convictions, un courage et une détermination sans faille pour enfin faire des droits des Afro-Américains une réalité.  


Sources, pour aller plus loin :

 

Harriet Tubman:

-        Série Underground : inspirée de l’histoire d’Harriet Tubman

-        Harriet, Film

-        Podcast France Culture : « La Moïse Noire de l’Amérique (2 épisodes) »

Billy Holiday:

-        Documentaire : Un supplément d’âme, Arte.

-        http://www.jazzradio.fr/news/culture-et-societe/31448/decouvrez-l-histoire-derriere-strange-fruit-de-billie-holiday

      Rosa Parks :

-        https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-deux-parties/rosa-parks-12-rosa-parks-pas-celle-que-vous-imaginez

      Martin Luther King:

-     Documentaire Dr Martin Luther King Junior : I have a dream, réalisé par Culture Tube (accessible sur Youtube)

      Ray Charles :

-     https://www.vanityfair.fr/culture/voir-lire/articles/le-jour-ou-ray-charles-a-refuse-de-chanter/46413

-     http://www.myblackhistory.net/Ray%20Charles.htm

 

      Barack Obama:

-       https://www.parismatch.com/People-A-Z/Barack-Obama

-       Film Barry, Netflix

Violences policières, incarcération :

-       https://www.lexpress.fr/actualite/monde/huit-chiffres-accablants-qui-montrent-l-ampleur-du-racisme-aux-etats-unis_2127271.html

-       https://www.lexpress.fr/actualite/monde/george-floyd_2127173.html

-       https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/le-buzz-des-etats-unis-la-population-carcerale-au-plus-bas-depuis-20-ans-1014178

-       Documentaire13th, Ava Duvernay, Netflix

       Kamala Harris :

 

-       https://www.britannica.com/biography/Kamala-Harris

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